Auto-école en ligne : où en sommes-nous ?
A leur arrivée, les auto-écoles en ligne, à l’image d’Auto-école.net, Permigo ou encore Ornikar, promettaient d’être plus pratiques, plus efficaces et surtout moins chères que leurs consœurs traditionnelles. Qu’en est-il vraiment ? Entre faillites, déboires judiciaires et réussites, l’heure est au bilan.
En 2017, Permigo est devenue bien malgré elle le symbole du fiasco dans le secteur des auto-écoles en ligne. À tel point que pour bon nombre d’observateurs — au premier rang desquels les écoles de conduite traditionnelles — c’est le modèle économique des auto-écoles en ligne tout entier qui était voué à l’échec. Toutefois, bien que la mésaventure de l’ancien numéro 3 français des écoles de conduite en ligne ait été fracassante, cette analyse semble quelque peu expéditive.
Pour rappel, Permigo a été placée en redressement judiciaire en janvier 2017 par le Tribunal de commerce de Lyon, qui avait donné trois semaines à l’enseigne pour trouver un repreneur et ainsi éviter la faillite. Une décision qui n’a pas manqué d’inquiéter les quelque 10 000 élèves qui avaient cru aux promesses de la startup. En l’absence d’un repreneur, ces derniers risquaient en effet de perdre tous les deniers qu’ils avaient investis.
En mai 2017, ces derniers purent pousser un ouf de soulagement : le groupe Arcan annonçait la reprise de l’auto-école en ligne. Mais les élèves de la startup lyonnaise n’étaient pas au bout de leurs peines pour autant : d’anciens clients de Permigo 1 viennent en effet de découvrir, début janvier, qu’ils allaient « devoir repasser à la caisse pour rester chez Permigo 2 », affirme le magazine Lyon Capitale.
« Depuis 7 mois maintenant, PermiGo 2 permet aux anciens élèves PermiGo 1 de poursuivre leur formation. Cependant, nous n’avons plus la possibilité de continuer de délivrer ces heures gratuitement », a indiqué le groupe repreneur à ses élèves. Ces difficultés, qui semblent désormais interminables, désavouent-elles le modèle économique des auto-écoles en ligne ? Pas vraiment.
Permigo, une sortie de route prévisible
La faillite de Permigo s’explique par des raisons comptables : obnubilée par les prix, la startup n’est jamais parvenue à trouver un équilibre financier viable. Le forfait à 799 euros qu’elle proposait ne permettait pas de couvrir ses dépenses, à savoir un système informatique, des locaux, un parc de voitures, une soixantaine de moniteurs salariés, une trentaine d’employés et encore moins les quelque 50 000 euros de taxes foncières annuels liés à la quinzaine de sites qu’elle possédait.
Par ailleurs, le secteur des auto-écoles classiques, très concurrentiel, connaît lui aussi des faillites à répétition. Selon Philippe Colombani, président de l’Union nationale des indépendants de la conduite (Unic), « 15 auto-écoles ferment chaque mois en France ». Et pour cause. « Les auto-écoles classiques rentrent de moins en moins dans leurs frais, déclare Romain Durand, créateur de Lepermislibre, dans les pages de Challenges. Coûts incompressibles, plannings complexes à gérer, personnel en CDI, dépendance des centres d’examens : autant de problèmes que nous avons réglés avec le numérique », ajoute-t-il.
Auto-école.net en pole position
Enfin, le principal concurrent de Permigo, Auto-école.net, se porte quant à lui très bien. « Nous avons lancé Auto-école.net en 2014, et nous revendiquons déjà 23 000 élèves formés. Aujourd’hui, nous recrutons entre 1 000 et 1 500 nouveaux inscrits tous les mois », explique Stanislas Llurens, son fondateur.
Le modèle d’Auto-école.net semble en effet être à l’épreuve du feu. Son secret : digitalisation maximum des contenus, réduction des frais fixes et lutte acharnée pour l’optimisation du temps d’utilisation des voitures et du planning des moniteurs. « L’ennemi de l’auto-école, ce sont des plannings pas remplis », souligne Stanislas Llurens dans La Tribune.
Ornikar, l’autre poids lourd du secteur, affiche également des chiffres solides. D’après Les Échos, la startup enregistre une croissance moyenne de 20 % depuis 18 mois. Néanmoins, l’auto-école semble accuser le coup ces temps-ci. Inscrite dans une démarche qui vient titiller les rigidités législatives de l’économie française façon Uber, Ornikar a eu de nombreux démêlés avec la justice. Pas moins de neuf procès en deux ans. Pas de quoi inquiéter son fondateur, Benjamin Gaignault, qui reste persuadé que ces nombreux déboires sont le signe que le potentiel de son entreprise « est énorme ». S’il dit vrai, 2018 devrait — encore — être une année riche en rebondissements pour le secteur des auto-écoles.
F.Bullot