Le charbon, énergie non grata dans le monde
La COP 23 – conférence sur le changement climatique – s’est refermée à Bonn le 17 novembre avec quelques bonnes nouvelles dont celle concernant le charbon. À l’initiative du Royaume-Uni et du Canada, une alliance regroupant une vingtaine de pays (dont la France) a été créée afin d’entamer une sortie progressive du charbon, première source d’électricité dans le monde (40%) mais énergie la plus dommageable pour le climat et la qualité de l’air.
Comme on pouvait malheureusement le craindre, cette COP 23 a été le théâtre d’une triste démonstration de la part des Etats-Unis qui, par le biais de son Président, Donald Trump, avait déjà annoncé son souhait de quitter l’Accord de Paris. Lors des premiers jours de la conférence, la délégation du deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre avait brillé par sa discrétion. Jusqu’au 13 novembre où elle a organisé une conférence sur le pétrole, le gaz et le charbon. Comme une provocation, George David Banks, assistant spécial du président Donald Trump pour l’environnement, a fait l’apologie du charbon, estimant qu’il « ne fait pas de doute que les énergies fossiles vont continuer à être utilisées ». Cette provocation, qui n’a pas manqué de faire réagir de nombreux militants et des personnalités américaines comme Michael Bloomberg ou Al Gore, a permis de souder les pays réellement engagés dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Une prometteuse alliance
Trois jours plus tard, à l’initiative du Royaume-Uni et du Canada, la riposte a eu lieu à travers « l’Alliance pour la sortie du charbon ». Vingt pays – dont la France, l’Italie, les îles Marshall, le Portugal ou encore la Belgique – et six Etats fédéraux canadiens et américains se sont engagés à éliminer graduellement leurs centrales au charbon. Chaque pays a fixé sa date limite (2022 pour la Nouvelle-Zélande ou la France, par exemple). « Nous avons rejoint une coalition en cohérence avec nos propres engagements qui vise à nous débarrasser définitivement du charbon », a déclaré Nicolas Hulot, le ministre français de la Transition écologique. De son côté, Jens Mattias Clausen, un responsable de Greenpeace, a estimé qu’il s’agissait « d’un signal positif de l’élan mondial contre le charbon ». Combustible le plus polluant pour la planète mais largement utilisé par les Etats-Unis et d’autres pays en développement, le charbon traditionnel (dépourvu de technologies dites « CCS » permettant de capter le CO2) est une entrave à la croissance verte et à la protection climatique, de manière générale.
La France, bon élève
Dès le mois de juillet dernier, la France, par le biais de Nicolas Hulot, avait déjà émis son souhait de mettre fin au charbon comme source de production d’électricité d’ici à 2022. Sur notre territoire, il existe encore cinq centrales produisant 4% de notre consommation annuelle. Trois d’entre elles appartiennent à EDF. L’énergéticien français, qui a déjà fermé 10 unités entre 2013 et 2015, a annoncé en octobre son désengagement dans le charbon et le gaz en Pologne (EDF Polska). Une transaction avec l’énergéticien public polonais a été scellée, permettant à EDF de récupérer près d’un milliard d’euros. Toutefois, elle garde un pied sur le sol polonais à travers ses filiales EDF Énergies Nouvelles et Dalkia.
Lors de la COP 23, Emmanuel Macron en a également profité pour expliquer sa défiance vis-à-vis du charbon. Tout en confirmant la fermeture des dernières centrales françaises d’ici la fin 2021, le Président français est revenu sur le dossier du nucléaire qui reste lié au charbon : « Prétendre que nous devrions accélérer la fermeture de centrales nucléaires sans avoir préalablement répondu à cela, c’est nous condamner dans les prochaines années à rouvrir des centrales à charbon ».
La piste du charbon vert
Mais qu’adviendra-t-il alors des dernières centrales françaises ? En 2013, EDF a lancé son plan « charbon 2035 ». Son principe : investir 350 millions d’euros sur le site de Cordemais et 160 millions d’euros dans celui du Havre afin de faire émerger une filière fonctionnant grâce à la co-combustion du charbon et d’une biomasse qu’on surnomme « charbon vert ». Concrètement, il s’agit de faire fonctionner la centrale thermique de Cordemais grâce à un matériau propre produit grâce aux déchets verts collectés.
Selon les derniers tests menés, le charbon vert présente à peu près les mêmes propriétés que le charbon traditionnel, ce qui facilite une production en co-combustion. Pour qu’elle soit viable, la centrale de Cordemais version « propre » doit encore trouver un modèle économique viable pour réguler les coûts de production liés à la collecte des déchets verts.
Enfin, concernant la centrale de Gardanne (Bouches-du-Rhône), l’avenir s’annonce plus flou. En 2011, Uniper, l’exploitant de la centrale, avait annoncé vouloir faire de Gardanne la plus grande centrale biomasse d’Europe. Aujourd’hui, le projet est remis en cause car il se montre très gourmand et onéreux : près de 850 000 tonnes de bois par an sont nécessaires pour qu’elle fonctionne à plein régime. Aujourd’hui, le permis d’exploitation reste suspendu à la décision de Nicolas Hulot qui a décidé de « prendre de la hauteur afin d’éviter toute décision brutale ». Décidément, la transition écologique reste un sujet complexe…