Allemagne : la sortie du nucléaire devant les juges
Plusieurs opérateurs allemands de centrales nucléaires, se sentant lésés par les fermetures anticipées de leurs installations, sont venus plaider leur cause devant la justice et pourraient bien bénéficier d’importantes indemnités. Un coup dur pour le gouvernement qui verrait une fois de plus le coût de la sortie du nucléaire dépasser largement toutes les prévisions.
L’Allemagne face au coût exorbitant du zéro nucléaire
Le désengagement nucléaire progressif de l’Allemagne, décidé en 2011 suite à la catastrophe de Fukushima, a placé le pays dans une situation énergétique complexe. Se tournant pleinement vers les énergies renouvelables, il atteignait dès 2015 32,5 % d’énergies renouvelables dans sa production électrique, et devrait sans problème réaliser son objectif pour 2020 fixé à 35 % du mix électrique. Ces chiffres éloquents cachent toutefois une réalité bien différente en matière de coût de l’électricité et d’émissions de CO2. L’Allemagne est devenue dans le même temps un des pays européens les plus pollueurs du fait d’un recours au charbon accru ces dernières années mais également un des pays, avec le Danemark, où l’électricité est la plus chère, presque deux fois plus cher que le tarif actuel en France.
Et la situation pourrait bien empirer au regard du contentieux qui oppose aujourd’hui les opérateurs de centrales nucléaires allemandes et le gouvernement. Ces derniers (E.ON, RWE, et Vattenfall), estimant avoir été « expropriés » de leurs outils de production, réclament en effet des indemnités pour la fermeture subite de leurs plus vieux réacteurs ordonnée par Berlin. Si la cour du Tribunal constitutionnel de Karlsruhe, en charge du dossier, ne devrait pas s’exprimer avant plusieurs mois, la menace est très claire pour le gouvernement et pourrait s’élever à plusieurs milliards d’euros. Le chiffre de 20 milliards circule d’ores et déjà dans les médias et placerait, il est certain, l’Allemagne dans une situation énergétique calamiteuse.
Ce coût exorbitant lié aux impératifs de démantèlement des centrales nucléaires outre-Rhin et l’effort financier considérable demandé par les fournisseurs au gouvernement, remettent donc en cause ici la pertinence des choix énergétiques fait par l’Allemagne, à l’heure où l’atome s’impose à l’international comme la seule énergie propre et économiquement viable pour supporter la transition énergétique en cours.
Le nucléaire, un choix économiquement responsable
L’attractivité de l’énergie nucléaire semble en effet faire son chemin et de nombreux pays, en recherche de stabilité énergétique, se tournent désormais vers cette alternative. Cette tendance est soutenue en grande partie par la croissance de la demande d’électricité en Asie, une région globalement favorable à l’énergie nucléaire, ainsi qu’au rôle grandissant du nucléaire dans les politiques d’atténuation du réchauffement climatique à l’échelle planétaire.
La Chine par exemple s’est fixée pour objectif de doubler ses capacités nucléaires d’ici à 2020 afin de renforcer ses moyens de production sans augmenter ses émissions de gaz à effet de serre. 24 réacteurs sont actuellement en cours de construction, et devront s’ajouter aux 30 réacteurs en activité dotés d’une puissance cumulée de 28,3 GW. Le Japon revient lui aussi progressivement à l’énergie nucléaire après plusieurs années de tergiversation. Si l’hésitation des autorités nippones est compréhensible suite à la catastrophe de Fukushima, les difficultés économiques et écologiques rencontrées par les collectivités locales depuis l’arrêt total des réacteurs en 2013, ne semblaient pas supportables à long terme.
Enfin, de nombreux pays d’Afrique et du Moyen-Orient comme les pays du Maghreb, l’Afrique du Sud, l’Iran ou l’Arabie Saoudite, souhaitent désormais s’engager dans l’énergie nucléaire (ou augmenter leur capacité de production nucléaire) afin de réduire leur dépendance aux hydrocarbures dans le respect des objectifs climatiques. Bien que nécessitant des investissements de base importants, l’énergie nucléaire leur garantirait en effet une production d’électricité propre, stable et bon marché pour plusieurs décennies. La France, grande puissance nucléaire mondiale, en est aujourd’hui le meilleur exemple. Géré par le groupe EDF, notre parc de 58 réacteurs fournit plus de 75 % de l’électricité à l’échelle nationale faisant ainsi de l’Hexagone un des pays européens les plus abordables en termes de prix de l’électricité. La France jouit également d’un indice d’émissions par habitant largement favorable de 5 tonnes de CO2 par an contre plus de 10 tonnes en Allemagne.