Taxe carbone : quel prix pour quelles émissions ?
Face aux limites du système des quotas révélées depuis plusieurs années sur le marché européen, la taxe carbone semble désormais être le seul moyen capable d’influer durablement sur le comportement des émetteurs. Mais si le principe fait aujourd’hui quasiment l’unanimité en France, sa mise en œuvre n’en reste pas moins complexe et conflictuelle au regard des difficultés rencontrées pour définir les contours d’une telle taxe.
En effet, chiffrer la quantité de carbone que produisent tous les biens et services commercialisés tout au long de leur « cycle de vie », c’est-à-dire au stade de leur production, durant leur usage et au moment de leur élimination, n’est pas chose aisée. En théorie, il suffit aujourd’hui d’appliquer le Bilan Carbone, méthode de calcul gouvernementale qui entend évaluer l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre d’une organisation, distinguant d’une part les émissions directes induites par la combustion d’énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon, etc.) et d’autre part, la somme des émissions indirectes induites par l’achat et la production d’électricité, par la chaîne logistique et le transport de biens ou de personnes.
Une fois les principaux postes d’émissions identifiés, chaque organisation se verra imposer une taxe en fonction de la quantité de carbone dont elle est responsable (exprimée en tonnes équivalent CO2) afin d’encourager la réduction des émissions via des démarches de développement durable.
Dans les faits toutefois, si l’estimation des émissions issues de la combustion des énergies fossiles dans le secteur énergétique ou les transports, semble relativement efficace, l’évaluation précise des émissions indirectes est quant à elle beaucoup plus aléatoire. Il faut dire que ces émissions nous concernent tous, ménages, entreprises, acteurs publics, dans nos déplacements ou dans la consommation de chauffage ou de climatisation. Toute activité humaine est en effet source de gaz à effet de serre, d’où la grande difficulté d’appréhension pour les pouvoirs publics.
Cela étant et une fois le bilan réalisé, encore faut-il appliquer un tarif au carbone à la fois juste et pertinent. Consistant à donner directement un prix au carbone en définissant un taux d’imposition sur les émissions de GES, ce prix diffère alors du système d’échange de droits d’émissions et sera donc variable d’un Etat à l’autre.
Réunies lors du Sommet des entreprises pour le climat (Business & Climate Summit) organisé les 20 et 21 mai derniers, plusieurs milliers d’entreprises ont évoqué ensemble la définition d’un véritable prix du carbone suffisamment élevé pour influer sur les décisions d’investissements. Un prix du carbone fixé aux alentours de 40 euros la tonne d’ici à 2020 serait selon eux potentiellement efficace et devrait augmenter progressivement pour atteindre la barre des 100 euros à l’horizon 2030.
Pour rappel, la tonne de carbone sur le marché européen est aujourd’hui aux alentours de 7 euros, un tarif plombé par la crise économique et le ralentissement de l’activité mais également par une baisse des émissions, qui provoque l’accumulation des quotas d’émissions et donc la chute des prix. En France, le prix du carbone fixé par le gouvernement passera de 14,5 euros en 2015 à 22 euros en 2016.