L’offre d’achat venue d’Italie qui sème le trouble sur l’avenir du Club Med
Alors qu’il avait jusqu’à 18 h lundi 30 juin pour déclarer ses intentions à l’Autorité des marchés financiers, Andrea Bonomi, actionnaire majoritaire du Club Med depuis mai a attendu le dernier moment avant de lancer sa contre-OPA sur le groupe français de vacances, également convoité par le fonds français Ardian, lui-même allié au conglomérat chinois Fosun.
Une contre-OPA hostile met à mal l’offre d’Ardian-Fosun
Ce qui devait arriver arriva. Après un an d’attente de la décision de justice devant valider l’offre soumise par le duo Ardian-Fosun pour acquérir le capital du Club Med, c’est Andrea Bonomi, industriel italien mais également premier actionnaire du Club, qui a formulé une nouvelle offre d’achat, supérieure à celle du tandem franco-chinois. Les raisons de cette lenteur peuvent être discutées, certains l’attribueront à la justice française pendant que d’autres pointeront du doigt la pagaille instaurée par les actionnaires minoritaires. Mais la n’est plus la question. Face à l’offre d’Andrea Bonomi, faut il craindre pour l’avenir du Club ?
En juillet 2013, l’avenir s’annonçait radieux pour le Club Med. Le fonds français Ardian, allié au conglomérat chinois Fosun, lançait uneoffre publique d’achat (OPA) amicale sur le groupe de vacances. Résultat d’une concertation à trois, entre Henri Giscard d’Estaing, PDG du Club, Ardian et Fosun, l’opération avait pour but de faire basculer le Club Med dans une nouvelle dimension. De nouveaux villages en Chine, des services haut-de-gamme et une attention particulière portée à « l’identité française » du groupe constituaient les piliers dudéveloppement du Club. Un an et une contre-OPA plus tard, tous ces beaux projets semblent s’éloigner.
Depuis le lundi 30 juin, fini les nouveaux villages et l’amélioration de la qualité des services, l’actualité n’est plus vraiment aux projetsd’avenir. Avec son offre, l’italien Andrea Bonomi a jeté un voile sur l’avenir du Club. Les questions qui s’étaient posées il y a un an se posent de nouveau aujourd’hui : quelles sont les intentions de cet industriel ? Quelle est sa vision du futur du groupe ? Les premières réponses avancées plaident plutôt à la faveur du tandem Ardian-Fosun.
D’abord, qui est Andrea Bonomi ? Que souhaite faire celui qui se présente comme un industriel italien, d’un groupe de vacances français ? Il semblerait que son intérêt pour le Club Med s’inscrive dans un intérêt plus général pour les firmes en difficulté possédant un potentiel de revente intéressant. Andrea Bonomi serait ce qu’on appelle communément un « raideur ». Si cet homme d’affaires a réalisé de jolis coups avec Ducati ou Aston Martin, certaines de ses affaires tournent au vinaigre comme en témoigne sa sortie de Banca Popolare di Milano, la septième banque italienne empêtrée dans des problèmes de gouvernance. L’orthodoxie de ses pratiques est également discutable : pour répondre à l’offre amicale montée par Ardian-Fosun pour le Club, Bonomi a lancé une OPA hostile, ce qui signifie que cette offre s’est faite sans l’accord de la société ciblée.
Plus préoccupant que la personnalité d’Andrea Bonomi, ce sont ses intentions pour le futur du Club qui portent à la plus grande réserve. Si son passé de raideur interpelle, les difficultés qu’il rencontrera à l’avenir pour développer le groupe de vacances semblent de taille. Alors qu’Ardian-Fosun prévoyait un développement en Chine, que Fosun prenait en charge les actions locales, Bonomi aura fort à faire pour trouver de nouveaux partenaires chinois. Non seulement les projets d’avenir n’ont plus aucune garantie, mais c’est également l’implantation française du groupe qui se trouve menacée, provoquant une levée de boucliers justifiée. Henri Giscard d’Estaing affirmait au Figaro : « Tout mouvement brutal, tout changement qui ne serait pas fondé sur une connaissance réelle et profonde du Club Med, de son activité et de ses valeurs, serait dangereux pour lui ».
La ligne du Club Med et de son PDG est donc celle de la défense du cachet français du groupe. La clef du succès du Club en Chine tiendrait au fait que la population chinoise puisse bénéficier de vacances à la française et non d’un simple village-club mondial. Si Laurent Fabius a été convaincu par Henri Giscard d’Estaing, il semblerait opportun qu’Arnaud Montebourg, ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique apporte son soutien à ce fleuron du tourisme français. La Caisse des dépôts et consignations,déjà actionnaire du groupe, réfléchirait à un montage afin de préserver l’ancrage français du Club en appuyant l’offre d’Ardian-Fosun.